A 13h40 je songeai à fermer mon blog, pour la bonne raison que nous allons tous mourir un jour ou l’autre.
A 13h41 j’entrepris de me faire des pâtes : je m’emparai d’une casserole, la plaçai sous le robinet et tournai la poignée d’eau chaude. Pendant qu’elle se remplissait, je me demandai si, dans un souci d’économie, il valait mieux attendre que l’eau soit bien chaude avant de placer la casserole sous le jet, ou bien s’il était préférable de la remplir d’eau froide quitte à attendre plus longtemps l’ébullition une fois l’eau sur le feu ; je réfléchis un instant à la question et en conclus que j’étais un con.
A 13h42, comme une idée de post me vint à l’esprit, je décidai de remettre la fermeture du blog à une date ultérieure.
Quand nous n’étions pas paisiblement installés devant le poste de télévision comme des petits enfants sages, ma grande soeur et moi entrions parfois en conflit, le plus souvent pour un rien. «Arrête de m’embêter ou je vais me transformer !» prévenait-elle.
Et malheureusement il arrivait en effet que son regard se fige soudainement : je savais alors que le Malin était sur le point de s’emparer de son âme. Ses mains se crispaient, un sourire démoniaque se dessinait sur son visage et bientôt des grognements infernaux allaient s’en évader : elle voulait me dévorer et me poursuivrait où que je fuisse. Etre dans la peau d’une proie traquée me terrorisait tant que la seule échappatoire à ma portée était de courir me blottir contre elle en l’implorant de revenir à la raison – mais son petit rire diabolique se moquait de mes prières en pleurs. Pris de panique j’empoignais ses cheveux et la créature entamait alors une série de cris sauvages comme pour annoncer ma mort imminente. Désespéré je tentais de m’évanouir en me laissant basculer en arrière, toujours agrippé je sentais mes pieds s’envoler, mais les hurlements ne faisaient que redoubler d’atrocité. A bout de nerfs je finissais par lâcher prise, tombais sur le sol, ouvrais les yeux et découvrais ma soeur revenue à elle en sanglots – la pensée d’avoir persécuté son jeune frère contre son propre gré devait lui être douloureuse.
Et puis après avoir séché nos larmes et s’être fait rappelé à l’ordre, on retournait tranquillement regarder la télé.
Hélas, dans le cadre d’une image plus fidèle à la réalité, c’est moins joyeux.
On peut certes y voir une vague lueur diffuse pas désagréable, mais on y regarde surtout ce petit détail gênant qui à l’opposé occupe un espace ridicule.
Sillonnant le cosmos pépère à bord de mon vaisseau, après ce retard malencontreux que j’ai relaté aux derniers épisodes, quelle ne fût pas ma surprise lorsque tout à l’heure je jetai un oeil par le hublot.
Ce con a fini par trouver un abat-jour de lampe murale volant et s’est échappé.